DC.

Publié le 8 Octobre 2014

L’occupation de nos modernes échevins est donc de vendre notre ville. Inutile de préciser qu’ils n’ont aucune passion pour Rouen. Ils voient la ville comme un potentiel dont ils escomptent des bénéfices. A défaut d’exploiter les habitants (encore que) il leur faudra donc exploiter ses rues, certains de ses immeubles, beaucoup de ses monuments. Pas tous, les cinq ou six endroits assez malléables pour être achetés, transformés, puis vendus. Comme le moulin dont l’âne fait tourner la meule.

Dans le genre, le doigté est de ne pas se disperser. Être maître du jeu. Ainsi de la cathédrale, devenue objet de toutes les attentions. Aujourd’hui, l’endroit parait presque neuf. Dans ma jeunesse, croyant ou pas, on s’en préoccupait peu. On passait devant. A la rigueur une visite à la crèche au moment de Noël, le vague rappel que Richard Cœur de Lion y logeait son cœur, ou que le tombeau des cardinaux d’Amboise était une bien belle chose. Pour le reste, on vantait le portail des libraires, celui de la Calende, et la tour lanterne.

Ailleurs, il fallait voir le Palais de Justice, le Gros-Horloge, et le musée de peinture. Les guides touristiques vous en disaient l’essentiel. Le mieux, pour tout voir, était de loger à l’hôtel Solferino ou à celui de la Poste. Le Grand Hôtel de la Poste. Mais surtout, ce parcours (ou ce séjour) avait un caractère non coercitif. Si vous ne voulez pas, on vous force pas. Voyez où nous en sommes rendus. Attendons sans impatience le mémorial de Jeanne d’Arc ; ce sera de la muséographie new-look, de celle qui coûte cher et ne laisse pas de traces. Un coup d’éponge, ce sera propre. Les guides-conférenciers se calquent sur les détergents ; il vous suffit de lire la notice.

A cette époque, si l’on sortait de la cathédrale par la rue Saint-Romain, on ne pensait pas à regarder la vitrine de Dame Cake ou la boutique de Mercadier. On tournait à droite pour filer vers le portail de Saint-Maclou. La rue n’étant pas piétonne, il fallait se garer de deux ou trois Peugeot ou Citroën. Rue de la République, on attendait que le feu passe au rouge pour traverser le passage clouté. Comme dit l’autre : C’était le bon temps !

Tout le long du chemin, on avait vu des antiquaires et des antiquités. Tapis, tableaux, cristaux. Les vitrines miroitantes. Rien ne se regardait avec des yeux neufs. On n’apprenait rien, on se souvenait. La flânerie prenait tout l’espace. Le jour baissait, l’heure passait. A regarder sa montre, on concluait : Déjà ! Cette époque dura ce qu’elle avait à durer. Peu à peu, on arriva au contemporain. Là, il semble que tout soit différent. A présent.

Déjà, le matin, il faut penser à l’heure de midi. C’est par où ? Suivez le guide. Chose pour laquelle ils se retrouvent au Vieux-Marché, à trente autour d’un menu à quinze. Tout compris. Par la vitre, on aperçoit l’église Jeanne d’Arc, ses vitraux, son toit en forme de poisson. Demain ? Mais non, ils seront repartis !

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