DLXLII.

Publié le 1 Septembre 2014

James, ami de toujours, est mort le 17 août. Inhumation le 23. Cancer, comme beaucoup. Nous voici au crématorium. Pour 11h15, a-t-on dit. Chaque minute compte. N’empêche, peu de monde. Comme diraient les journaux : assistance clairsemée. Il est vrai que nous sommes encore en période de vacances. Bon prétexte à quelques-uns pour être absents. James aurait dû prévoir ; ça aurait occupé notre mois d’octobre. En revanche (façon de dire) toutes ses femmes sont là.

D’abord, la dernière, légitime et ultime. Là surtout au bénéfice de la chronologie, pas de la longévité. Pour cette autre catégorie, c’est Geneviève. Toujours aussi guillerette et que tout le monde salue (tandis que l’autre, n’est-ce pas). Geneviève, la vraie, la seule. Ils furent mariés une bonne trentaine d’années. Bonheur habituel. Celui des années premières et fastes. Jeunes et beaux, la consommation des choses en plus.

Puis Jacques rencontra Jacqueline. Jamais j’aurais imaginé. Un divorce compliqué, un constat d’adultère (genre de l’époque) et de nouveau un mariage. Autre temps et autre histoire. Cette fois à Boisguillaume. Le temps d’un peu plus d’une dizaine d’années. Des hauts et des bas, et l’habitude prise (permanente) de voir si l’herbe n’est pas plus verte ailleurs. Parfois vrai, souvent faux.

D’où suite logique (je vous l’avais bien dit) Jacques rencontra Dany. Cette fois, le grand amour ! Surtout la jeunesse retrouvée. Si mon ami approchait de la cinquantaine, la nouvelle (une collègue de travail) dépassait à peine vingtaine. Comme disait la comptable : elle va un petit peu fort ! Oui. Désormais, plus besoin d’adultère, nous en sommes au constat à l’amiable (les avocats restaient sur leurs bonnes mines). La petite (c’est Jacques qui parle) était fine ; le grisonnant fut ravi d’être papa. De fait, on le vit moins dans les bars. Il fallait le soir, être à la maison. Là-bas, fausse chaumière du côté de Roumare.

Il se passa encore une petite dizaine d’années. Et devinez quoi ? Jacques rencontra, etc. Non, vous n’y êtes pas. Jacques retrouva Geneviève. Retour à la case départ ? Pas tout à fait. S’il quitta femme et enfant, le revenez-y perçut par trop le goût amer d’une existence pour rien. Ou : tout ça pour ça. Si Geneviève n’était plus Geneviève, James était toujours James. Enfin presque. Bonne raison pour devenir très malade. Et de partir avec l’infirmière. Celle-ci, plus très jeune, mais accueillante. Et divorcée. Quatrièmes et dernières noces.

Ce jour, la mariée d’il y a trois ou quatre ans était seule. Tout comme était seul ce grand garçon à peine chagriné, flanquée d’une mère impérieuse, à jamais revancharde. J’ai reconnu Jacqueline, un œil et un sourire. Quelles retrouvailles, ici et maintenant. Souvenirs ? Nous avions bien rit lors du constat d’adultère. Il suffisait d’être à deux dans un appartement et d’ouvrir au commissaire de police accompagné du mari de la dame. Dire qu’on a rendu de tels services !

En attendant la crémation, on nous a passé des chansons de Barbara. Si la photo et bonne et Il pleut sur Nantes. Ce jour là, à Rouen, aussi.

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F
Au revoir et merci, James. Vive la vie!
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L
Je ne sais si vous serez encore là dans 5000 ans, mais il y a 5000 ans on parlait déjà de vous :)<br /> (extrait d'une série)<br /> Amicalement<br /> <br /> http://www.lemajor.fr/2014/09/rouen-chronicle-la-saga-continue.html
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